"Nous aidons le patient à faire face au choc traumatique de la maladie."
Titulaire d’un master 2 de psychopathologie enfant et adulte et d’un master recherche, Nathalie Draskic est depuis 17 ans psychologue à l’AGDUC, membre du réseau ReinOmed, sous le statut d’Espic à but non lucratif, sur le site de La Tronche. Au sein d’une équipe de quatre psychologues de l’AGDUC, elle prend en charge des patients avant leur entrée en dialyse. « Les patients peuvent demander à nous voir pour des raisons très variées mais l’intérêt est qu’ils peuvent venir à tout moment dès qu’ils apprennent qu’ils sont malades, explique Nathalie Draskic. Certains souffrent alors d’un syndrome dépressif réactionnel, ils sont obligés de modifier leurs habitudes, et ce changement peut avoir des répercussions diverses (financières, sur leur couple ou leur qualité de vie…) »
70% des patients arrivent en dialyse dans le cadre du parcours et 30% en urgence. « Pour ces derniers, c’est un choc traumatique. Ils traversent une phase de déni pour se protéger. »
Le moment de l’annonce de la maladie est donc un moment charnière. Les patients sont alors nombreux à solliciter directement un rendez-vous avec un psychologue. La rencontre peut aussi être proposée par un médecin, un infirmier, un diététicien, ou un assistant social quand ils voient que le patient peine à accepter la maladie ou la dépendance. « Nous voyons à peu près 50% des personnes dialysées, relève Nathalie Draskic, il est primordial que le patient soit partie prenante de cette démarche. »
L’écoute et la parole permettent d’établir le lien et au patient d’entamer le processus d’acceptation de la maladie. « Souvent les entretiens se déroulent dans mon bureau mais nous pouvons être amenés à voir les patients en chambre individuelle dans la salle de dialyse ou à leur domicile », détaille Nathalie. Les visites à domicile correspondent à l’idée de l’AGDUC de favoriser le maintien au domicile du patient. Avec les assistants sociaux et les infirmiers, les psychologues sont notamment amenés à faire des visites à domicile avant l’hémodialyse ou la dialyse péritonéale. « Chez eux, on voit leur milieu de vie, leur dépendance, leurs difficultés. Certains suivent un traitement à domicile et cela permet de voir comment leur traitement interfère sur leur vie privée. »
Chaque premier mardi du mois, les psychologues animent une réunion d’information dialyse et greffe. Les patients qui approchent de la dialyse sont invités à y prendre part. « Participer à cette réunion leur permet d’échanger, de voir qu’il y a d’autres personnes qui vivent avec cette maladie et cela peut aussi les aider au choix du traitement », poursuit Nathalie. Le moment du traitement peut aussi être un temps d’échange entre patients pour transmettre leurs expériences sur la dialyse et leurs difficultés.
Les psychologues proposent aussi un groupe d’éducation thérapeutique pour les patients en parcours (avant la dialyse). « Ils échangent sur la maladie et sur les répercussions sur la famille, au travail… C’est un atelier très demandé », indique Nathalie.
La psychologue peut également être amenée à voir, avec l’accord du patient, un proche qui souhaite évoquer son anxiété, ou s’interroge sur la meilleure manière d’aider le malade sans le bouleverser, et sans s’épuiser. « Au moment du décès d’un patient, sur un temps court, nous accompagnons l’aidant pour ne pas couper d’un coup la relation et lui permettre de reprendre le cours de leur vie », explique Nathalie. Les psychologues sont aussi régulièrement sollicités pour parler des questions autour de la greffe, de l’attente. « Certains ont besoin de parler pour se préparer, ils appréhendent cette étape, le risque de rejet, de prendre le rein de quelqu’un d’autre, parfois d’un proche. C’est une étape difficile et d’ailleurs, certains refusent. »
Nous pouvons avoir des questions très différentes sur la parentalité, le retour au travail… « Cette maladie bouleverse toutes les questions de la vie et nous sommes là pour les aider à traverser les différentes étapes », détaille Nathalie Draskic.
Les psychologues interviennent aussi au sein des équipes soignantes avec qui ils ont des réunions régulières. « Nous avons mis en place des formations pour répondre aux thèmes qu’ils souhaitent travailler : relaxation, risque suicidaire, addictologie ; douleur et dialyse, agressivité et dialyse…Les équipes sont très investies aussi dans la prise en charge de cette maladie lourde. »
Nathalie apprécie tout particulièrement d’exercer son métier dans une structure privée à but non lucratif. « Cela me permet d'avoir un sentiment d'utilité et d'être dans un environnement assez privilégié et protégé dans lequel les convictions des personnes sont respectées, affirme-t-elle. Chacun peut apporter sa pierre à l'édifice dans l'intérêt du patient. Tout le monde est très impliqué, cela permet de faire avancer les nombreux projets. »
Les équipes médicales, soignantes et administratives des établissements fédérés par REINOMED sont mobilisées pour favoriser les parcours de soins et de vies des patients atteints de maladies rénales en dialyse.
Chaque approche nécessite des pratiques de prévention, de suivi et de soins.
Leurs expertises sont pointues et diverses. Elles répondent, en effet, aux enjeux de prévention, de soins, d’accompagnement à la greffe et de développement d’une dialyse adaptée aux besoins et attentes du patient, dont le domicile.
Les soins sont organisés et dimensionnés pour répondre à tous les besoins et attentes de chaque patient.
Il s’agit d’informer au mieux les patients et leurs aidants, de les orienter et de les accompagner dans leur parcours de soins.
Les offres de soins sont personnalisées, de l’intégration du patient dans le dispositif à la transition vers les traitements de suppléance.
Aussi, la chaine de soins et de gestion est plurielle, au travers de métiers divers, très spécialisés et à haute valeur humaine, scientifique, médicale et technologique.
Nous vous les présentons ici :
"Nous essayons sans cesse d’améliorer la qualité de vie des patients insuffisants rénaux."
Professeur émérite à l’Université Lyon 1, ayant fait toute sa carrière en Néphrologie au CHU de Lyon, chef de service et chef de pôle, le Pr Maurice Laville s’intéresse depuis le début de sa carrière à l’insuffisance rénale chronique. Il a notamment été président de la Société Francophone de Néphrologie, Dialyse et Transplantation (SFNDT) puis de la Fondation du Rein.
Depuis 2005, le Pr Laville préside l’Association pour l’Utilisation du Rein Artificiel à Lyon (AURAL). Cet établissement de santé privé d'intérêt collectif (ESPIC) à but non lucratif, géré par une association loi 1901, prend en charge environ 1 300 patients sur 19 sites en Région Rhône-Alpes. « L’Aural a été créée en 1974 à une époque où l’accès à la dialyse était limité, les néphrologues ont imaginé des associations pour que les patients puissent accéder à la dialyse chez eux ou dans un centre proche de leur domicile », explique le Pr Laville.
Hormis ses tâches de représentation, quel est le rôle du président ? « Mon métier de néphrologue est centré sur le soin et la prise en charge des patients, résume le Pr Laville. Ma fonction de président est de m’assurer du bon fonctionnement de l’AURAL (350 salariés), de veiller à que les soignants aient les moyens de bien prendre en charge les malades et de proposer aux patients souffrant d’insuffisance rénale chronique des solutions de proximité médicalisées (l’hémodialyse, trois heures de traitement, trois fois par semaine, ou la dialyse péritonéale exclusivement à domicile sont proposées par l’AURAL) ». Une autre mission, d’ordre administratif, consiste à gérer l’association avec le conseil d’administration, et de rassembler les associations qui existent en France pour faire valoir les spécificités du secteur sanitaire non lucratif.
L’AURAL fait partie de la fédération ReinOmed, présidée par le Pr Laville. ReinOmed rassemble 24 associations qui prennent en charge près de 40% des quelque 50 000 patients dialysés pour une insuffisance rénale chronique en France. « Notre force est d’avoir une capacité d’initiative innovante et une autonomie de décision qui nous permettent d’être très réactifs », commente Maurice Laville. Cela a contribué à faire de l’AURAL un laboratoire d’expérimentation sur le suivi à domicile, de proposer aux patients des activités physiques adaptées (APA) ou des actions d’éducation thérapeutique. « Nous essayons sans cesse d’améliorer la qualité de vie des patients insuffisants rénaux », poursuit le Pr Laville. L’un des enjeux à l’avenir sera de réduire le nombre de patients en insuffisance rénale qui ont besoin d’une dialyse ou d’une greffe. « Il faudrait que tous les patients dépistés soient pris en charge rapidement pour faire en sorte que le plus petit nombre d’entre eux arrive en dialyse ou ait besoin d’une greffe de rein, affirme le président de l’AURAL. Cela nécessite de renforcer la prévention et le dépistage qui ne bénéficie pas aujourd’hui d’un programme organisé. »