Alain Quiquet, responsable logistique, Santélys

"Nous essayons de prendre le moins de place possible"

Santélys -Loos-Les-Lille

A 49 ans, Alain Quiquet, responsable logistique du service dialyse de Santélys, association à but non lucratif membre de ReinOmed, qui prend en charge des patients insuffisants rénaux dans les Hauts-de-France, a parcouru du chemin. Arrivé à Santélys en 2008, il a d’abord été chauffeur livreur, avant d’occuper le poste d’assistant logistique puis de devenir responsable logistique en 2014. Sous la responsabilité d’une pharmacienne, et à la tête d’une équipe de 2 assistants, 4 magasiniers et 7 chauffeurs, il est en charge d’assurer la livraison du matériel et des traitements des patients à domicile et des unités de dialyse dans tous les Hauts-de-France. C’est depuis l’entrepôt de 1100 m² de Loos-Les-Lille –où peuvent être stockées 800 palettes sur des racks disposés jusqu’à 8 mètres de hauteur– que partent les traitements des patients insuffisants rénaux de la région.

« Nous gérons environ 1600 patients dont 1400 répartis dans les 34 unités de dialyse et 200 à domicile. La maintenance est assurée par le service biomédical, moi, je gère la logistique pure d’approvisionnement de matériel et produits de santé, notre contrainte est de livrer du volume et du poids comme des poches de dialyse, poches à base d’eau et de différents éléments comme le calcium et le potassium, qui s’apparentent à des poches de perfusion. » Le traitement des insuffisants rénaux chroniques est volumineux et représente entre 200 et 900 kilos de matériel par mois et par patient (pour l’hémodialyse quotidienne à domicile). Cela nécessite de livrer une à deux fois par mois les unités de dialyse, selon leur capacité de stockage. Les livraisons chez les patients sont généralement mensuelles mais elles peuvent avoir lieu deux fois par mois voire être hebdomadaires si le patient dispose de peu de place chez lui. « Chez les personnes qui ont un petit logement, on essaie de faire en sorte de prendre le moins de place possible, décrit Alain Quiquet. Notre démarche est de préserver le patient. Une semaine de traitement peut représenter une vingtaine de cartons. Il faut aussi parfois livrer des machines comme des générateurs de dialyse qui pèsent une centaine de kilos. Il nous arrive de faire appel à des déménageurs quand nous devons l’installer à l’étage d’un logement sans ascenseur ».

Le chauffeur est chargé de ranger correctement le matériel chez le patient en tenant compte du FIFO, first in, first out, c’est-à-dire de la bonne rotation des stocks en fonction des dates de péremption. Quand le chauffeur les a livrés, les patients se livrent eux aussi. « Nous prenons le temps d’échanger avec eux, précise Alain Quiquet. Certains ont besoin de parler et la livraison est un moment d’échange. Nous avons à l’esprit que quand le matériel arrive chez lui, c’est aussi la maladie qui débarque dans sa maison. »

Pour assurer les tournées, l’équipe logistique de Santélys dispose d’une flotte de véhicules de plusieurs gabarits. Deux poids lourds de 12 et 19 tonnes permettent de transporter 20 palettes dans les unités de dialyse. Deux petits camions de sept tonnes peuvent livrer six palettes dans un rayon de 100 kilomètres. Enfin, quatre utilitaires servent à transporter quatre palettes dans des tournées les plus éloignées. « Nous n’utilisons pas tous les véhicules tous les jours mais ils nous permettent de répondre à toutes les contraintes de livraison. » Car la logistique requiert de l’organisation et ne supporte pas l’improvisation. « Nous livrons cinq jours par semaine, et réalisons cinq tournées quotidiennes : chaque jour, nous adressons huit tonnes pour les unités de dialyse et trois tonnes pour les patients à domicile, explique Alain. Nous gérons notre planning de livraison grâce à un logiciel métier qui permet d’intégrer les patients dans les tournées en fonction de leur secteur pour optimiser les trajets ».

Les tournées de livraison sont donc anticipées. « Notre journée commence à 7h le matin, nous effectuons le chargement des véhicules de 7h00 à 8h00, puis on commence les réceptions des fournisseurs et la préparation du matériel à acheminer deux jours avant la livraison pour avoir toujours un temps d’avance, et avoir le temps de nous réorganiser en cas d’absence dans l’équipe », poursuit Alain.

Le service logistique aide aussi les patients qui ont un traitement à domicile à gérer leur approvisionnement quand ils partent en congés. Car la maladie, elle, ne prend pas de vacances. « Nous faisons livrer du matériel avec des partenaires partout en France en fonction du lieu de villégiature », détaille Alain Quiquet, selon qui « le sens du service » et la satisfaction des patients sont au cœur des valeurs de Santélys. Le responsable logistique est très fier de travailler dans cette structure à but non lucratif qui lui a donné la possibilité d’évoluer. « Cela a donné un véritable sens à mon parcours professionnel, confie-t-il. J’ai moi-même fait évoluer des salariés de mon équipe. C’est très valorisant de travailler dans cet environnement. »



Stanislas TROLONGE, Diététicien - Nutritionniste, AURAD

"Nous ne donnons pas des menus-clés mais nous adaptons les habitudes des patients"

AURAD -Gradignan

Aider les patients souffrant d’insuffisance rénale à limiter l’évolution de leur maladie grâce à une bonne hygiène alimentaire, tel est le credo de Stanislas Trolonge. Diététicien-nutritionniste à la maison du rein de l’Aurad, à Gradignan, Stanislas, 39 ans, a rejoint en 2005 l’Aurad Aquitaine, association à but non lucratif, membre de ReinOmed.

« Les diététiciens-nutritionnistes, dont la présence est relativement récente dans les centres de dialyse, font partie des équipes médicales avec les pharmaciens, infirmières, psychologues, coach d’activité physique adaptée, et nous sommes régulièrement sollicités par les médecins », explique-t-il.

Avant de prodiguer ses conseils, le diététicien évalue l’état nutritionnel des patients insuffisants rénaux dialysés ou non. Il le fait à l’aide de régulières prises de sang, de la mesure  et surveillance du poids, masse musculaire et masse grasse. Il quantifie leurs apports alimentaires (énergie, protéines, graisses, sucres, minéraux et vitamines) et dépiste d’éventuelle dénutritions des patients âgés qui ont parfois des pathologies associées. « L’approche diététique a pour objectif de réduire la progression de la maladie rénale en soulageant le travail des reins, en diminuant les excès de sel et de protéines, résume Stanislas Trolonge. Lorsqu’ils sont dialysés, les patients finissent par ne plus uriner et ils vont stocker dans le sang certains minéraux qui peuvent être en excès (phosphore, potassium). Nous formulons des recommandations alimentaires pour limiter ces excès. Le traitement de dialyse coûte de l’énergie et les risques de dénutrition sont très importants, cela leur demande de prendre plus de protéines mais sans excès, c’est une science de bien s’alimenter. »

Les diététiciens recommandent ainsi aux patients de réduire leur consommation de sel dans les aliments transformés industriels ou dans les plats de tous les jours, souvent de diminuer la viande et la volaille, riches en protéines, d’augmenter les végétaux, de diminuer le sel mais augmenter les minéraux alcalins et d’utiliser des graisses de qualité (huiles). « Nous conseillons l’alimentation la plus naturelle possible », indique Stanislas Trolonge.

Le conseil nutritionnel doit être réalisé avec tact. « Si c’est mal fait, c’est vécu comme une contrainte supplémentaire. Quand on a une bonne approche d’écoute et que l’on propose des solutions, cet échange est mieux accepté ! Nous faisons évoluer le métier vers une approche de diététique positive et non pas restrictive. Il faut casser le stéréotype selon lequel les diététiciens sont là pour faire maigrir les gens. »

Le diététicien s’emploie donc à être didactique, s’appuyant sur les publications scientifiques. Au stade de la maladie rénale, l’urgence d’une bonne alimentation avec moins de protéines et de sel repose sur des données solides qui montrent qu’on peut retarder l’entrée en dialyse. « Lors d’un entretien motivationnel, nous ne donnons pas des menus-clés mais nous adaptons les habitudes des patients, pour les impliquer. »

L’Aurad a une file active de 400 patients suivis pour insuffisance rénale et 400 dialysés, soit environ 800 patients en tout. « Dès qu’un patient est pris en charge, il est vu au moins une fois. Nous essayons de mettre en place au moins un suivi bi-annuel. Pour l’insuffisance rénale chronique avancée, on les voit tous les 3 à 6 mois, pour les dialysés, tous les 3 mois », détaille Stanislas Trolonge, qui gère la coordination des diététiciens qui interviennent à l’Aurad, salariés comme libéraux. Le diététicien-nutritionniste est très satisfait d’exercer au sein d’une structure à but non-lucratif : « L’Aurad m’offre un espace de liberté certain dans la prise d’initiative, la mise en place de projets à destination des patients, affirme Stanislas Trolonge. Cette structure à échelle humaine permet une collaboration facilitée, efficiente avec le reste de l’équipe médicale. Enfin, la mise à disposition d’outils de diagnostic et d’évaluation nous permet d’être à la pointe du soin diététique. »

Les patients semblent de plus en plus ouverts à l’idée de soigner leur alimentation. « La vague vegan nous rend service et facilite la réduction de la consommation de viande. » Engagé à l’Aurad, Stanislas Trolonge l’est aussi au sein de l’Association de diététique et de nutrition en néphrologie (ADNN) qu’il préside et qui vise à favoriser l’implantation des diététiciens dans les structures avec des temps de présence suffisants.

A l’heure où les naturopathes et autres pseudos spécialistes en nutrition tentent de gagner du terrain, Stanislas Trolonge rappelle que « les diététiciens sont les seuls habilités à donner des conseils en diététique et nutrition ».



Agnès PEYRIN, Pharmacienne, AURA Santé

"« Nous invitons les patients à être transparents sur le suivi de leur traitement pour qu’ils ne s’exposent pas à des risques » "

AURA Santé -Cébazat

Après 15 ans en recherche et développement et en assurance qualité dans l’industrie pharmaceutique puis une expérience en hospitalisation privée, Agnès Peyrin est arrivée en mars 2020, « une semaine avant le premier confinement » à l’Aura-Santé, association à but non lucratif membre de ReinOmed. Elle a été recrutée en tant que pharmacienne gérante, chef du service pharmacie à usage intérieur. « Nous avons deux activités, décrit-elle : la dialyse - notre association compte 16 unités en Auvergne et en Bourgogne – Franche-Comté - et l’hospitalisation à domicile. » L’une des missions d’Agnès Peyrin est de s’assurer du bon acheminement sur les différentes unités de dialyse des médicaments, dispositifs médicaux stériles, reins artificiels et tubulures pour brancher les patients et épurer leur sang. « Nous livrons nos unités de dialyse avec une équipe composée de trois préparateurs, un logisticien, trois chauffeurs livreurs qui sont en permanence en déplacement, et deux magasiniers. » L’Aura-Santé compte aussi 130 patients qui dialysent à leur domicile. Et ces personnes, il faut aussi les livrer chaque mois. L’Aura-Santé dispose d’un entrepôt de stockage de 500 m2 qui permet de stocker un mois de DM, pour les besoins des unités de dialyse et des patients.

La pharmacienne est aussi sans surprise responsable des médicaments ! « Dans notre activité, nous utilisons peu de médicaments, explique Agnès Peyrin. Trois traitements sont courants pour les patients dialysés pour lesquels nous avons une expertise spécifique : les anticoagulants, l’EPO pour augmenter le taux de globules rouges et le fer pour compenser l’anémie liée à la perte de flux sanguin. » Au-delà de la délivrance de ces traitements, il est nécessaire de réfléchir au moment auquel on administre les produits - « On les injecte souvent en 2e partie ou en fin de dialyse »- pour qu’ils ne soient pas éliminés. La pharmacienne évoque aussi l’utilisation des antibiotiques injectables car les patients sont plus à risque d’infection après la création de fistules artério-veineuses ou après la pose de cathéter veineux centraux.

Le rôle de la pharmacienne gérante ne se limite pas à mettre à disposition les médicaments. Il consiste aussi à s’assurer que les traitements sont efficaces. Agnès Peyrin a le projet de mettre en place des entretiens pharmaceutiques avec des patients ayant un risque en lien avec des problématiques particulières pour vérifier qu’ils n’ont pas de traitement inadapté. « Nous essayons aussi de sensibiliser les patients au fait qu’ils sont acteurs de leur traitement et qu’ils doivent communiquer avec leur médecin s’ils arrêtent un traitement car ils auront par exemple, des effets secondaires. Nous les invitons à être transparents pour ne pas s’exposer à des risques. »

Le premier médicament en dialyse, c’est l’eau et le dialysat qui permet les échanges. Toutes les unités d’hémodialyse sont équipées de traitement d’eau en double osmose, le pharmacien est responsable de la qualité de cette eau au niveau chimique et bactériologique. « Je réalise le planning de prélèvement de ces traitements d’eau en double osmose et m’assure du respect de l’installation en validant les contrôles avant leur utilisation », précise Agnès. Bref, le rôle du pharmacien de dialyse est ultra-spécialisé. « On attend de nous d’être des experts du matériel pour une qualité optimale de la dialyse », résume Agnès Peyrin. La pharmacienne affiche sa satisfaction de travailler au service d’une structure à but non lucratif comme l’Aura-Santé. « Cela nous permet d’apporter aux patients, en tenant compte du mode de vie de chacun et des réalités des territoires, un éventail de modalités possibles pour la dialyse : dans des structures proches d’eux ou directement à leur domicile, afin d’impacter le moins possible leur qualité de vie », se réjouit-elle.



Pr Philippe ZAOUI, Néphrologue, Président de l’AGDUC

"Nous faisons en sorte que les patients soient acteurs de leurs soins "

AGDUC -Grenoble

Son premier contact avec la médecine, il l’a connu à 8 ans quand il a été opéré d’une cardiopathie. Plus tard, dans ses études de médecine, il a hésité entre l’endocrinologie, l’hématologie mais c’est finalement pour la néphrologie qu’il a eu le coup de cœur. « J’étais attiré par les spécialités gérant des pathologies chroniques et nécessitant un parcours, se souvient le Pr Philippe Zaoui, 65 ans. J’aime travailler avec les patients et des équipes professionnelles sur des projets au long cours. Imaginez, il y a des patients avec qui j’ai passé 25 ans ! »

Médecin hospitalier depuis la fin des années 1980, professeur de néphrologie à Grenoble, le Pr Philippe Zaoui préside depuis 2004 le conseil d’administration de l’AGDUC. Association créée en 1974, membre du réseau Reinomed, sous le statut d’Espic à but non lucratif, l’AGDUC dont le siège est à Grenoble prend en charge un millier de patients souffrant d’insuffisance rénale dans l’un des 17 centres fonctionnels en Isère, dans la Drôme, l’Ardèche, la Savoie et les Hautes-Alpes. Une structure à laquelle il se dévoue entièrement : « Nous faisons tout pour engager une prise en charge précoce et pour orienter le patient vers la greffe de rein ou pour la dialyse à domicile quand c’est possible. L’objectif est d’offrir la plus grande qualité de vie aux patients insuffisants rénaux. Notre intervention est très médicale mais aussi médico-sociale », explique le Pr Zaoui.

La néphrologie est en effet un métier dont l’approche a beaucoup évolué ces dernières années. « Etre néphrologue, ce n’est pas seulement soigner l’insuffisance rénale chronique, c’est aussi être confronté à la question de la fin de vie, la difficulté de la gestion de la maladie à domicile », poursuit Philippe Zaoui. Les patients démarrent leur traitement vers 70 ans en moyenne. Les soignants sont aussi en contact avec des plus jeunes et des gens très âgés à qui sont proposés des soins conservateurs, des personnes pour qui des soins itératifs en établissement de santé sont une contrainte trop lourde. « Ils ont besoin de réassurance grâce au suivi à domicile, à l’éducation thérapeutique. Nous sommes engagés dans une personnalisation des projets de soins. Nous faisons en sorte que les patients soient davantage acteurs de leurs traitements car plus ils le sont, plus ils sont contents », affirme Philippe Zaoui.

Le métier a aussi beaucoup changé ces dernières années grâce aux nouvelles technologies. « La télésurveillance permet par exemple d’avoir un œil depuis Grenoble sur des patients à Moutiers distants de plus de 100 km avec une balance et des outils connectés », illustre le néphrologue. Surtout, le modèle ni public ni privé de Reinomed, auquel appartient l’AGDUC, est une force aux yeux du médecin. « Notre statut d’établissement privé à but non lucratif, nous permet d’être réactifs et de faire évoluer nos pratiques, de mener une économie solidaire et sociale. »

 L’AGDUC propose quatre modalités de dialyse : la dialyse à domicile (hémodialyse ou péritonéale) choisie par 15% de patients, la dialyse allégée en centre dans de petites unités (de 6 à 8 postes avec une infirmière) pour laquelle ont opté 15% de patients, des unités de dialyse médicalisée hors de l’hôpital et plus proches du domicile (avec une visite médicale une fois par semaine), qui concerne 35% des malades, ou la dialyse conventionnelle dans un centre associé au plateau technique hospitalier pour les patients lourds (35%). Du lundi au samedi, les gens sont dialysés trois fois par semaine en moyenne 4h de 6h30 à 18h30. Quelques personnes réalisent leur dialyse en soirée.

« Souvent les patients craignent le côté intrusif du traitement dans leur vie et leur quotidien. Il est important qu’ils participent au choix de la méthode de traitement la plus adéquate ». Pour cela, l’Agduc a mis en place des unités d’accueil et d’orientation (UAO) pour les patients qui démarrent des traitements de suppléance afin qu’ils s’adaptent à ce rythme de vie pendant 4 à 8 semaines et puissent voir quelle prise en charge est la plus adaptée à eux.



Emmanuelle Quillien, Responsable qualité et Gilles Lucas, Représentant des usagers, AUB Santé

"Nous avons créé une formation pour sensibiliser les soignants aux droits des patients"

AUB SANTE -Rennes

Ils se côtoient depuis 13 ans et ont appris à s’apprécier. Emmanuelle Quillien, juriste en droit de la santé, et Gilles Lucas, représentant des usagers depuis 2006, travaillent ensemble à la commission des usagers de l’AUB Santé, établissement de santé à but non lucratif membre de ReinOmed qui vient notamment en aide aux patients insuffisants rénaux chroniques en Bretagne et Sud Manche. Ils ont lancé ensemble il y a quelques mois une formation pour sensibiliser les professionnels de l’AUB Santé qui le souhaitent aux droits des usagers. « Notre motivation première était la méconnaissance mais aussi le décalage entre le droit du patient et la pratique réelle, explique Emmanuelle Quillien. Nous avons souhaité, avec cette formation qui s’appuie sur des exemples concrets faire prendre conscience aux soignants de certaines réalités. »

Rien de tel, donc de concilier la théorie à la pratique et d’allier l’expertise d’une juriste, qui s’appuie sur les textes de loi et le vécu de l’établissement, à l’expérience d’un patient averti. « Nous savons que les professionnels de santé travaillent avec l’intention de bien faire mais il peut leur arriver d’être indélicats sans s’en rendre compte, analyse Gilles Lucas. Le fait de rentrer dans une chambre sans frapper ou de frapper et d’entrer sans attendre, est un cas de figure banal. Or des patients n’ont pas forcément envie d’être vus nus, par exemple. Il est important de réfléchir sur ses propres pratiques. Y a-t-il des choses que j’ai faites et qui auraient pu me heurter si j’avais été à la place du patient ? »

La formation permet d’aborder plusieurs thèmes essentiels des droits des patients comme le consentement et le refus de soins, le droit à l’accès aux soins et les directives anticipées ; le droit d’accès à son dossier médical, le droit à l’information, le droit de choisir son établissement, le droit à un recours contre un établissement, le droit à la prise en charge de la douleur, au respect de son intimité et à la confidentialité des données. « Il n’y a pas eu un événement particulier à l’origine de cette démarche, affirme Emmanuelle Quillien. Mais nous avons ressenti le besoin de former les soignants sur ces thématiques pour rendre concret le droit des patients. »

« Un partage d’expérience sans filtre », précise Gilles Lucas, selon qui « il faut pouvoir parler même des sujets qui fâchent ». « Sur chaque thème, on relate le vécu du patient puis la plainte, les événements indésirables et les outils en place pour les professionnels pour y répondre », indique Emmanuelle Quillien.

L’échange se veut constructif, nullement moralisateur. « L’idée n’est pas de culpabiliser les professionnels mais de les aider à réfléchir à leurs pratiques », souligne Gilles Lucas. Cette formation, qui dure 6h à 6h30, en journée, sera organisée à nouveau à deux occasions au 2e semestre de 2022 : le 14 octobre à Morlaix et le 1er décembre à Rennes. « Pour beaucoup de soignants, ce moment sera la seule fois de l’année où ils pourront échanger aussi librement avec un représentant des usagers sans être dans le soin », affirme Gilles Lucas.

Au-delà des thèmes abordés, la formation permet aux professionnels et aux patients de l’AUB Santé de connaître l’existence des représentants des usagers dans l‘établissement. « Il est souvent difficile pour les patients de faire passer des messages. Ils savent qu’ils peuvent faire appel à moi, qui suis représentant des usagers mais pas patient à l’AUB Santé pour les accompagner si nécessaire », ajoute Gilles Lucas.

Si les difficultés relationnelles restent rares, une commission des usagers de l’AUB Santé se réunit lorsqu’un patient n’est pas satisfait ou quand un professionnel est mécontent du comportement d’un usager. Gilles Lucas est parfois amené à mener des conciliations. « Il est déjà arrivé deux ou trois reprises par le passé qu’un patient ait un comportement inapproprié avec un soignant, qu’il y ait une rupture de dialogue, détaille-t-il. Il est alors important que le patient puisse s’adresser à un autre usager, sans question d’autorité ou rapport de subordination. » Ce recours à un tiers permet de trouver des solutions.



Cédric Daré, Ingénieur biomédical à l'ASA

"« Mon but est d’identifier les éventuels problèmes pour prévenir les pannes » "

ASA -Metz

Le coup de la panne, on ne lui fait pas ! Depuis 2018, Cédric Daré est ingénieur biomédical à l’ASA Metz. Titulaire d’un master 2 d’ingénierie biomédicale et hospitalière, il a intégré l’association à but non lucratif membre de ReinOmed après une première expérience à l’hôpital public à Forbach (2010-2018). A l’ASA, Cédric intervient sur 4 sites (Metz, Saint-Avold, Freyming-Merlebach et Talange) en plus de Robert-Schuman (à Metz) pour lequel l’ASA est prestataire de maintenance en dialyse. « Un ingénieur biomédical a la responsabilité de tous les dispositifs médicaux présents dans un établissement de santé, du stéthoscope à l’IRM. Il est partie prenante avec l’équipe médicale et les infirmières du choix, de l’analyse des prix, de la mise en service et de la maintenance de ces matériels sur toute leur durée de vie », explique Cédric Daré, 34 ans. L’ingénieur biomédical peut aussi être associé à des travaux pour installer un scanner, par exemple, ou avec le service informatique pour permettre à du matériel biomédical de communiquer sur le réseau par exemple. Avec les fournisseurs, il participe à la formation des utilisateurs pour bien utiliser le matériel.

En intégrant l’ASA, Cédric s’est spécialisé dans la gestion de la maintenance préventive et de la sécurité du matériel servant à la dialyse ou aux traitements du rein. « Nous gérons principalement les générateurs de dialyse ainsi que les osmoseurs pour la production de l’eau de dialyse qu’il faut désinfecter plusieurs fois par semaine afin d’assurer une eau d’excellente qualité pour garantir la sécurité des patients. D’autres plus petits dispositifs médicaux sont également utilisés comme par exemple des pousse-seringues, des pompes à perfusion, des ECG ou encore des tensiomètres automatiques, précise-t-il. Le périmètre est plus restreint qu’un hôpital classique mais il demande une grande rigueur. Nous ne pouvons pas nous permettre que ça ne marche pas. » La moindre faille peut avoir des répercussions sur l’organisation programmée des soins. « Par exemple, si un osmoseur ne fonctionne pas, ce sont les dialyses de 32 personnes qu’il faut recaser le matin, l’après-midi ou le soir. Il est donc crucial que notre équipe de 4 techniciens, que je manage, soit rigoureuse pour prévenir autant que possible la panne. » Ce boulot doit être assuré 365 jours par an. Les 4 techniciens se répartissent donc pour qu’une présence soit assurée du lundi au samedi toute l’année, avec une permanence, même les jours fériés. De plus, une astreinte technique dialyse est mise en place afin de palier à tout problème intervenant pendant la nuit ou le dimanche. « Notre métier consiste à identifier la source d’éventuels problèmes pour éviter les dysfonctionnements, on est dans la maintenance prédictive. Dès qu’un problème est relevé, on fait un staff, on en discute ensemble et on prend une décision », explique Cédric. L’ingénieur reconnaît humblement avoir été néophyte sur la dialyse en arrivant à l’ASA. « Je suis entré dans un milieu inconnu, j’ai amené mes compétences de gestion et d’outils pour faire tourner le service. » Le responsable n’hésite donc pas à s’appuyer sur les compétences de toute son équipe. Il s’appuie aussi sur une bonne prévoyance logistique. « Les problèmes de traitement d’eau sont ceux qui peuvent le plus nous mettre en difficulté, et si l’un d’eux tombe en panne, il faut vite remplacer la pièce défectueuse », explique Cédric Daré. Les centres de l’ASA utilisent l'hémodiafiltration (HDF), méthode d'épuration extra-rénale réalisée avec de l’eau bi-osmosée mais en cas de problème majeur, il est possible de revenir à une hémodialyse conventionnelle avec de l’eau osmosée une seule fois. « Ça arrive rarement mais une panne peut survenir », anticipe Cédric. L’équipe doit être parée à intervenir en cas de coupure d’arrivée d’eau du bâtiment ou de panne électrique. « Nous avons des groupes électrogènes de secours, nous ne lancerons pas une dialyse en nous appuyant sur eux mais on peut les utiliser pour finir une dialyse. » « La force des centres de dialyse est d’avoir une cellule de crise rapide à activer. Elle réunit le directeur de l’ASA, le pharmacien, l’ingénieur biomédical, un technicien, le responsable qualité, les médecins et infirmières coordinatrices pour avoir une grande réactivité et ne rien laisser passer. On peut prendre le temps d’aller au bout des choses et de mettre en place des procédures dans un système sécurisé. »

Cédric Daré apprécie de travailler dans une structure privée à but non lucratif « à taille humaine » (120 salariés), qui permet de facilement se réunir pour trouver des solutions quand c’est nécessaire. « J’ai mis en place un roulement de visite hebdomadaire des 4 sites et comme les techniciens sont d’astreinte le soir, la nuit et le WE, ils sont tous prêts à intervenir peu importe le site concerné. » Une autre partie du métier de Cédric consiste à réaliser les contrôles réguliers des bâtiments, des ascenseurs, de l’électricité, du chauffage et de la ventilation. « Mon métier est très transversal et m’amène à avoir des contacts avec beaucoup d’acteurs de la structure : des techniciens, des commerciaux, des médecins et infirmiers, le directeur et l’administration. C’est aussi une partie très intéressante de mon activité. Je fais également parti du COPIL Informatique et participe au pilotage du système d’information. Le numérique est incontournable dans le monde de la santé aujourd’hui et il faut s’appuyer dessus pour proposer des soins et un suivi de qualité à tous nos patients. »



Stéphane Duleba, Educateur sportif à l'ASA

"Mon objectif est d’aider les patients à retrouver une autonomie générale"

ASA -Metz

Après 10 ans d’activité dans un centre de réadaptation fonctionnelle, Stéphane Duleba a été recruté en mars 2022 à Metz en tant qu’enseignant en activité physique adaptée (APA) par l’Association Saint-André (ASA), structure privée à but non lucratif, membre du réseau ReinOmed.

« J’ai été embauché pour faire pratiquer une activité physique aux patients dialysés, explique l’éducateur sportif de 34 ans. Mon but est de les engager le plus possible dans le renforcement, la coordination et de leur faire prendre conscience de leurs dispositions physiques afin de les aider à récupérer certaines capacités perdues. » Pour les autres patients en pré-suppléance, un réseau géré par l’ARS Grand Est, Prescri’mouv, a été mis en place pour les orienter dans leur pratique d’activité physique.

Grâce à une feuille interne que les médecins lui transmettent, l’éducateur sait si le patient dialysé est pris en charge par une association sportive. Si ce n’est pas le cas, il peut disposer de huit séances gratuites au démarrage pour se lancer dans une APA.

Les patients sont-ils tous prêts à faire cet effort physique alors que leur maladie est déjà éprouvante ? « Pour une majorité, il faut discuter, argumenter, démontrer leur intérêt à pratiquer une activité physique adaptée. Je leur explique à chaque fois que l’APA peut leur apporter un plus et qu’elle n’est pas une contrainte. D’autres s’en rendent compte spontanément et acceptent facilement de se lancer. » Avant d’entamer l’APA, l’éducateur réalise auprès des patients dialysés qui le souhaitent un bilan de capacité physique qui porte sur le renforcement musculaire des membres supérieurs, la coordination des membres supérieurs et inférieurs, l’endurance des membres inférieurs, et le travail cognitif de mémoire.

Et aujourd’hui, l’APA à l’ASA, ça roule. « Entre 20 et 25 personnes pédalent au quotidien en position semi-allongée, le plus souvent avec un pédalier clipsé au lit », explique Stéphane Duleba (voir photo). Les séances durent en moyenne 20 à 30 minutes. L’éducateur sportif a repéré les gens moteurs pour motiver les hésitants. « Certains patients, ont eu envie d’entamer une APA après en avoir vu d’autres en action. J’ai eu récemment l’exemple d’une jeune femme, qui voyant les autres pratiquer, a décidé de se lancer et maintenant, elle apprécie. »

Une salle de sport doit bientôt ouvrir qui permettra de proposer aux personnes dialysées d’autres activités physiques (gymnastique douce, yoga, renforcement musculaire, ergocycles, steppers, tapis de marche, jeux de ballons…) « Notre objectif est d’aider les patients à retrouver une autonomie générale dans les activités de la vie quotidienne, de pouvoir monter des marches ou éviter d’être essoufflé au bout de 100 mètres, explique Stéphane Duleba. D’autres patients recherchent, eux, le bien-être. »

A ceux qui en douteraient, la littérature scientifique est formelle : « Depuis une dizaine d’années, des articles montrent les bienfaits de l’APA sur les patients dialysés. » Stéphane Duleba s’emploie donc, tout en restant dans une démarche bienveillante et empathique, à motiver la démarche de l’activité physique. « J’essaie d’instaurer un climat de confiance avec le patient pour leur montrer que l’on peut faire autre chose que rester allongé sans rien faire pendant la dialyse. » Cela fonctionne plutôt bien. Environ un tiers des 150 personnes dialysées à l’ASA pratiquent une activité physique. 



Noëllie Luna, Infirmière en Pratique Avancée à l'AVODD

"Nous ne proposons pas uniquement des soins mais un accompagnement, un réel suivi."

AVODD -Brignoles (Var)

Cela fait dix ans que Noëllie Luna a intégré l’AVODD, établissement de santé privé à but non lucratif, membre de ReinOmed, qui prend en charge environ 400 patients atteints d’une maladie rénale chronique à Hyères, Fréjus, Brignoles et Toulon (Var).

Noëllie, 33 ans, occupe le poste d’infirmière de pratique avancée (IPA) au sein de l’unité de dialyse de Brignoles. Après son diplôme d’infirmière obtenu à l’IFPVPS de La Garde en 2010, la jeune femme a décroché il y a deux ans à Aix-Marseille Université son master, spécialité néphrologie, dialyse et transplantation rénale.

A ce titre, elle est en charge des parcours de pré-suppléance et de transplantation rénale, c’est-à-dire qu’elle mène et anime des entretiens avec les patients pendant lesquels elle donne des informations sur l’insuffisance rénale et sur les différentes techniques de suppléance (traitements). « Je les informe sur les modes de dialyse et sur la greffe, je les aide à constituer leur dossier s’ils sont adressés pour la greffe, je peux réaliser certaines ordonnances mais aussi des courriers pour aller voir les spécialistes », explique Noëllie.

Les IPA sont précieuses pour compléter la prise en charge médicale par les néphrologues dans le suivi des patients. Quand les patients arrivent à un stade avancé de pré-dialyse, ils sont reçus une fois par mois en consultation clinique, qui sont assurées en alternance par les médecins et l’IPA. « Je réalise ces consultations de suivi néphrologique après une première rencontre avec le patient et son néphrologue référent. Le patient doit donner son consentement pour le suivi IPA », précise Noëllie. L’infirmière de pratique avancée réalise aussi des entretiens éducatifs et préventifs, elle accueille les nouveaux patients et leur présente le service, et prépare ceux qui souhaitent prétendre à une greffe rénale.

L’IPA est satisfaite des nouvelles missions qu’elle occupe dans la prise en charge des patients insuffisants rénaux chroniques. « Ce qui me plaît avec ce nouveau métier, c’est que tout est à inventer, à créer, on essaie de travailler en parfaite coordination avec les néphrologues pour les consultations, indique Noëllie Luna. Ce poste d’IPA m’a aussi permis à titre personnel d’avoir une évolution de carrière en lien avec la néphrologie. »

Cette nouvelle fonction lui permet également de créer une relation plus intime avec les patients. Et ces derniers sont généralement satisfaits de pouvoir se tourner vers Noëllie et de l’appeler quand ils ont besoin de poser des questions. « Nous ne proposons pas uniquement des soins mais un accompagnement, un soutien et un réel suivi, précise Noëllie. Ce poste me permet d’avoir une vision globale sur le parcours du patient, depuis la pré-dialyse jusqu’à la dialyse ou la greffe. Pour les patients qui espèrent une greffe, je suis aussi un relais avec le néphrologue et l’équipe de transplantation rénale. »



Angeline Gueguen, Infirmière à l'AUB Santé

"En proposant l’hémodialyse et la dialyse péritonéale à domicile, on rapproche le traitement du patient"

AUB Santé -Quimper

Angéline travaille à l’AUB Santé de Quimper mais le plus souvent, cette infirmière de 34 ans, intervient au domicile des patients. Diplômée en 2010, elle s’engage à l’AUB Santé, établissement à but non lucratif créé en 1971 et membre du réseau ReinOmed, qui vient en aide aux patients insuffisants rénaux chroniques en Bretagne et Sud Manche. A l’échelle de l’AUB Santé, environ 2 000 patients sont traités par dialyse en centre ou à domicile chaque année.

« Je recherchais un métier dans le relationnel et le technique », résume la jeune femme. L’insuffisance rénale chronique répond à ces critères. Angéline prend en charge les patients dialysés, qu’ils soient hémodialysés à domicile ou en centre, ou en dialyse péritonéale à domicile.

L’infirmière présente aux patients qui ne sont pas encore entrés en dialyse les deux modes de prise en charge possibles à domicile.

Si le patient valide le choix de la dialyse péritonéale avec le néphrologue, il faut passer par la chirurgie pour lui placer un cathéter dans l’abdomen. La dialyse péritonéale consiste à infuser du liquide dans l’abdomen par le cathéter. Ce liquide va rester stagner pendant 4 heures, puis sera drainé par gravité. La poche est changée 3 à 4 fois par jour, 6 jours sur 7. « Soit les patients le font seul, soit une infirmière libérale peut les accompagner, pour les soins. »

S’il opte pour l’hémodialyse à domicile, le patient devra bénéficier de l’aide d’une tierce personne formée par l’équipe de l’AUB Santé pour intervenir en cas d’urgence. L’infirmière apprend aux patients à réaliser une auto-ponction pour mettre l’aiguille dans le bras relié à la machine. « On les forme à le faire de la façon la plus aseptique possible. Une fistule artérioveineuse est créée pour avoir la déviation d’une artère sur une veine et ainsi avoir un meilleur débit pour la dialyse. »

Après avoir été initiés en centre de dialyse, les patients peuvent ensuite suivre leur dialyse à domicile 2h à 2h30 par jour. « Ce sont surtout les patients jeunes qui choisissent cette technique qui demande de l’autonomie et de se familiariser à la machine. »

 Aujourd’hui, une vingtaine de patients dialysés à domicile sont suivis par l’équipe.

« Les deux méthodes sont aussi efficaces l’une que l’autre mais certains patients considèrent que la dialyse péritonéale est plus douce pour le corps », observe Angéline.

La lourdeur de la maladie amène patients et soignants à nouer des liens particuliers. « Nous avons de nombreux contacts, explique Angéline Gueguen. Ils nous voient régulièrement, nous les connaissons bien, eux, leur famille, leur maison. Il s’instaure une relation de qualité. »

Angéline apprécie les valeurs de la Fondation qui prône notamment la proximité, le confort et la personnalisation de la prise en charge. « Nous avons la volonté de satisfaire toutes les personnes malades et de nous adapter à leurs besoins car cette maladie n’est pas facile à accepter, observe-t-elle. En proposant l’hémodialyse et la dialyse péritonéale à domicile, on rapproche le traitement du patient, on essaie d’améliorer son confort et de le rendre acteur de sa maladie. »

Si certains patients ont accès à une greffe (après environ deux ans d’attente en Bretagne), d’autres ont plus de 30 ans de dialyse. « La dialyse maintient en vie. Et entre les séances, les patients peuvent vivre, avoir une vie de famille, travailler », conclut Angéline.



Corinne Levy, Responsable du pôle admission soins de support à la Fondation Charles Mion - AIDER Santé

"L’accompagnement social a toute sa place dans la prise en charge."

Fondation Charles Mion - AIDER Santé -Montpellier

« Accompagner des patients, c’est mon métier ! J’ai toujours travaillé dans le monde de la santé avec des médecins, infirmiers, aide soignants, secrétariats médicaux et j’adore ça. »

Assistante sociale de formation, diplômée en 1989, Corinne Levy a exercé pendant près de 20 ans au CHU de Montpellier où elle fut chargée de l’accompagnement social des personnes hospitalisées et de leur entourage, dans différents services de soins, médecine, chirurgie, urgences, addictologie.

Arrivée en tant que cadre socioéducatif à la fondation Charles Mion - Aider Santé en 2012, association à but non lucratif membre de ReinOmed, Corinne devient rapidement responsable du bureau des entrées et du pôle admissions soins de support. Elle veille à l’organisation des différents services (diététique, psychologique en plus du service social) à l’encadrement des équipes et des actions auprès des patients et des soignants.

« Je suis convaincue que l’accompagnement social a toute sa place et qu’il est important de travailler ensemble pour améliorer la qualité de vie des personnes, explique Corinne. L’analyse et l’évaluation d’un travailleur social de même que les temps d’échanges formels et informels, les partages de points de vue permettent d’adapter la prise en charge. »

Au-delà de ses fonctions managériales, Corinne continue d’exercer en tant qu’assistante sociale, son cœur de métier. « Cela consiste à informer et orienter les patients et leur entourage, dans tous les domaines de la vie quotidienne, depuis l’hébergement jusqu’au maintien à domicile en passant par l’accès aux droits quels qu’ils soient. »

Corinne accorde une grande importance à sa mission auprès des patients dont le quotidien est chamboulé par la maladie. « La dialyse, c’est une bombe dans la vie des gens, Il ne s’agit pas de les assister mais de les aider à un retour vers l’autonomie, à vivre avec la maladie. »

L’insuffisance rénale chronique entraîne des bouleversements dans le rythme de vie et peut provoquer des baisses de revenus importants ainsi que des arrêts de travail prolongés ou fréquents. « Certains patients, désemparés, n'envisagent même pas qu'une reprise du travail soit possible, observe Corinne Levy. En les informant sur leurs droits, nous essayons de limiter l’impact social de la maladie rénale et ainsi d’améliorer leur qualité de vie. »

Ces fonctions requièrent une grande polyvalence et une veille règlementaire permanente. « Nous ne travaillons pas seuls, précise Corinne. Au quotidien, nous nous appuyons sur les autres services, sur les administrations et les institutions publiques et privées. » L’organisation mise en place permet un accompagnement en tout point du territoire concerné. Il faut pouvoir répondre aux interrogations des 1 100 patients dialysés (80% en unité, 20% à domicile) mais aussi des 4 000 à 5 000 patients distincts reçus par an dans les 23 unités d’Aider Santé sur l’ensemble du Languedoc-Roussillon, du Sud-Aveyron, dans les départements de l’Hérault, du Gard, de la Lozère, des Pyrénées-Orientales et de l’Aude. « Nous intervenons sur l’ensemble du parcours, que le patient soit consultant, dialysé en unité ou à domicile », précise Corinne, qui encadre une équipe de 18 personnes et a une vision globale des divers établissements où elle se rend régulièrement pour rencontrer ses collaborateurs et les équipes soignantes.

Chaque nouvel arrivant en dialyse reçoit un courrier avec un trombinoscope présentant les différents professionnels - psychologue, assistant social et diététicien - à sa disposition. La rencontre systématique proposée, qui peut se dérouler à domicile si le patient le souhaite, permet de repérer d’éventuelles difficultés, d’agir en amont si besoin, d’informer et soutenir.

« Les patients disent souvent qu’ils sont dialysés, et non qu’ils sont insuffisants rénaux, il leur faut accepter le traitement plus que la pathologie », explique Corinne Levy. L’accompagnement psychologique du patient mais aussi de son entourage peut les aider à surmonter cette épreuve.

Parmi ses nombreux projets, Corinne Levy espère pouvoir relancer des journées, des espaces de parole ou ateliers pour les patients et leurs aidants mais aussi l’organisation de séjours de vacances, mis à mal par la situation sanitaire.

« Dans le monde de la maladie chronique, un attachement se crée avec les patients, malgré nous et quand on est informés de leur décès, nous sommes touchés et émus. Ça fait partie du métier même si on apprend à garder la distance et c’est ce qui fait notre humanité, non ? »